Pubs "Pouvoir d'achat", ardoise de 4,3 millions d'Euros...
On nous annonce le lancement à la télé, la radio, sur le net, d'une campagne de pub destinée à nous "informer" des mesures gouvernementales en faveur de la défense du pouvoir d'achat. De la pédagogie donc...
Je crois entendre cette étudiante de BTS Communication des entreprises qui me disait:"vous n'avez rien compris, la publicité est faite pour nous apprendre des choses, nous rendre plus intelligents". Bref, nous faire sortir de notre ignorance, nous ouvrir le chemin de la recherche de la vérité! De la philo quoi, mieux que Socrate, les profs de philo Jacques Séguela et Thierry Saussez!
J'enseignais pour la première fois la Psychosociologie de la communication, et tentais lors de ce cours de début d'année de définir la publicité, et défendais l'idée que son objectif premier est de "rendre public" un produit dans le but de le vendre à des prospects ou clients potentiels.
Qu'avais-je lu dans les livres?
PUBLICITE:
-"c'est l'ensemble des techniques de conception d'un message destiné à influencer le consommateur pour qu'il achète un produit ou un service, et des techniques de diffusion de ce message par l'achat d'espace dans les médias." Publicité et communication d'entreprise J.M. Utard, Lexitec Hachette.
-"action destinée à faire connaître un produit et le vendre...
La publicité n'est pas de l'information bien qu'elle puisse avoir un aspect informatif. C'est une communication de parti pris et partisane, qui a sélectionné un produit, une stratégie, un média et une cible. Contrairement à l'information, elle est subjective et elle veut agir sur les attitudes du récepteur...
La publicité n'est pas de la propagande, quoi qu'elle veuille influencer et qu'elle utilise parfois les mêmes techniques de persuasion. Toutefois, à la différence de la propagande, la publicité ne se cache pas et se revendique comme telle, elle possède ses propres codes. En outre, elle doit nécessairement tenir compte de ses récepteurs...
La publicité est un phénomène socio-culturel. Elle a une fonction d'innovation car elle propose des modèles culturels. Mais elle renforce aussi un certain conformisme en étant le reflet des normes et stéréotypes de la société dans laquelle elle se déploie." Langage et publicité V. Abad et I. Compiegne, Synergies Bréal.
Quant à Jacques Séguéla, je vous réserve sa profession de foi-ouverture d'un de ses bouquins en épilogue de cet article;"marieur"-publicitaire toujours proche du pouvoir, de François Mitterand à Lionel Jospin, c'est désormais Nicolas Sarkozy son nouvel ami. Mais il semble que ce soit Thierry Saussez, publicitaire de renom "reconverti" depuis avril dernier en délégué interministériel de la communication, en charge du service d'information du gouvernement (SIG) qui soit à l'origine de cette campagne de pub'. Plus de politique sans la patte de ces stratèges en communication, sans oublier les instituts de sondage.
Mais quel est le problème?
De thème de campagne, la défense du pouvoir d'achat ("mais ne nous expliquera-t-on jamais ce mot?" dirait Rousseau) devient un produit ou service, à vendre et acheter par des consommateurs que nous serions devenus, même en politique. Ne nous inquiétons pas, si la décision a été prise d'y consacrer plus de 4 millions d'Euros (qu'aurait-on pu en faire d'autre?) c'est que les études qui ont présidé à la conception de cette campagne publicitaire ont montré qu'elle va atteindre son objectif. La cible, le récepteur du message ne peut y échapper, va acheter, adopter l'attitude conformiste et stéréotypée ordonnée par le message.
Alors, puisque nos hommes politiques ne réussiraient plus leur mission d'explication des réformes, utilisons les spots publicitaires pour matraquer le message.
Le pire: il ne s'agirait même plus de propagande puisque cela se fait au grand jour. Postulat à discuter, quel récepteur maîtrise les ficelles d'une stratégie de communication publicitaire et politique pour éviter le piège?
Sécurité routière, santé et prévention, lutte contre les violences ou la pédophilie, la pub a déjà servi ces causes. La nouveauté c'est de voir aujourd'hui les mesures gouvernementales élevées au rang de "causes humanitaires", de produit ou service, de marque, et le citoyen réduit au rang de consommateur. La faute à qui? Relisons Le Prince de Machiavel.
"Pardon de te dire tu, mais je dis tu à tous ceux que j'aime, et comment n'aimerais-je pas celui qui s'interroge sur la pub? On y entre comme en religion. Premier commmandement: Ne fais ce métier que si tu as la foi. Il est passion avant d'être raison, don (et d'abord de soi) avant d'être technique, implication avant d'être fonction. La grande pub se pense avec la tête, mais s'écrit avec le coeur. Comment être un bon publicitaire? En aimant. Aime les marques qui t'offriront leur confiance, bats-toi pour les aider à franchir les frontières et les ans. Aime le consommateur, comprends ses mutations. Deviner demain doit être ton obsession. Enfin, aime, par-dessus tout, la pub. Adulée ou honnie, selon les temps, selon les continents, elle restera incontournable si elle continue de surprendre le consommateur avec ce qu'il désire. Nous consommerons plus dans les trente années à venir que depuis la naissance de l'humanité. Et comment consommer sans désirer? Deviens soldat du désir. Il n'existe pas de plus beau métier."
Jacques Séguela, La publicité, Les essentiels Milan.
Sophiste de métier! "Noble" inspirateur de nos hommes politiques.
Je vous passe l'explication de texte, et pourtant:
-je t'aime; -j'ai la foi; -c'est ma passion;-c'est un sacerdoce;-avec mon coeur;-aimer, aimer, aimer;-confiance;-désir;-"soldat!?! du désir";-plus beau métier!
Approche behavioriste (répétitions ou matraquage), psycho-dynamique (jouer sur, prendre par les sentiments), intégrative (être ou aspirer à devenir membre du groupe), bel exercice de style qui ne résiste pas une seconde à l'examen critique, si tant est qu'il soit encore possible. Surtout ne pas faire appel à la raison, au risque de manquer sa cible.
Déjà sur You tube!
Je crois entendre cette étudiante de BTS Communication des entreprises qui me disait:"vous n'avez rien compris, la publicité est faite pour nous apprendre des choses, nous rendre plus intelligents". Bref, nous faire sortir de notre ignorance, nous ouvrir le chemin de la recherche de la vérité! De la philo quoi, mieux que Socrate, les profs de philo Jacques Séguela et Thierry Saussez!
J'enseignais pour la première fois la Psychosociologie de la communication, et tentais lors de ce cours de début d'année de définir la publicité, et défendais l'idée que son objectif premier est de "rendre public" un produit dans le but de le vendre à des prospects ou clients potentiels.
Qu'avais-je lu dans les livres?
PUBLICITE:
-"c'est l'ensemble des techniques de conception d'un message destiné à influencer le consommateur pour qu'il achète un produit ou un service, et des techniques de diffusion de ce message par l'achat d'espace dans les médias." Publicité et communication d'entreprise J.M. Utard, Lexitec Hachette.
-"action destinée à faire connaître un produit et le vendre...
La publicité n'est pas de l'information bien qu'elle puisse avoir un aspect informatif. C'est une communication de parti pris et partisane, qui a sélectionné un produit, une stratégie, un média et une cible. Contrairement à l'information, elle est subjective et elle veut agir sur les attitudes du récepteur...
La publicité n'est pas de la propagande, quoi qu'elle veuille influencer et qu'elle utilise parfois les mêmes techniques de persuasion. Toutefois, à la différence de la propagande, la publicité ne se cache pas et se revendique comme telle, elle possède ses propres codes. En outre, elle doit nécessairement tenir compte de ses récepteurs...
La publicité est un phénomène socio-culturel. Elle a une fonction d'innovation car elle propose des modèles culturels. Mais elle renforce aussi un certain conformisme en étant le reflet des normes et stéréotypes de la société dans laquelle elle se déploie." Langage et publicité V. Abad et I. Compiegne, Synergies Bréal.
Quant à Jacques Séguéla, je vous réserve sa profession de foi-ouverture d'un de ses bouquins en épilogue de cet article;"marieur"-publicitaire toujours proche du pouvoir, de François Mitterand à Lionel Jospin, c'est désormais Nicolas Sarkozy son nouvel ami. Mais il semble que ce soit Thierry Saussez, publicitaire de renom "reconverti" depuis avril dernier en délégué interministériel de la communication, en charge du service d'information du gouvernement (SIG) qui soit à l'origine de cette campagne de pub'. Plus de politique sans la patte de ces stratèges en communication, sans oublier les instituts de sondage.
Mais quel est le problème?
De thème de campagne, la défense du pouvoir d'achat ("mais ne nous expliquera-t-on jamais ce mot?" dirait Rousseau) devient un produit ou service, à vendre et acheter par des consommateurs que nous serions devenus, même en politique. Ne nous inquiétons pas, si la décision a été prise d'y consacrer plus de 4 millions d'Euros (qu'aurait-on pu en faire d'autre?) c'est que les études qui ont présidé à la conception de cette campagne publicitaire ont montré qu'elle va atteindre son objectif. La cible, le récepteur du message ne peut y échapper, va acheter, adopter l'attitude conformiste et stéréotypée ordonnée par le message.
Alors, puisque nos hommes politiques ne réussiraient plus leur mission d'explication des réformes, utilisons les spots publicitaires pour matraquer le message.
Le pire: il ne s'agirait même plus de propagande puisque cela se fait au grand jour. Postulat à discuter, quel récepteur maîtrise les ficelles d'une stratégie de communication publicitaire et politique pour éviter le piège?
Sécurité routière, santé et prévention, lutte contre les violences ou la pédophilie, la pub a déjà servi ces causes. La nouveauté c'est de voir aujourd'hui les mesures gouvernementales élevées au rang de "causes humanitaires", de produit ou service, de marque, et le citoyen réduit au rang de consommateur. La faute à qui? Relisons Le Prince de Machiavel.
"Pardon de te dire tu, mais je dis tu à tous ceux que j'aime, et comment n'aimerais-je pas celui qui s'interroge sur la pub? On y entre comme en religion. Premier commmandement: Ne fais ce métier que si tu as la foi. Il est passion avant d'être raison, don (et d'abord de soi) avant d'être technique, implication avant d'être fonction. La grande pub se pense avec la tête, mais s'écrit avec le coeur. Comment être un bon publicitaire? En aimant. Aime les marques qui t'offriront leur confiance, bats-toi pour les aider à franchir les frontières et les ans. Aime le consommateur, comprends ses mutations. Deviner demain doit être ton obsession. Enfin, aime, par-dessus tout, la pub. Adulée ou honnie, selon les temps, selon les continents, elle restera incontournable si elle continue de surprendre le consommateur avec ce qu'il désire. Nous consommerons plus dans les trente années à venir que depuis la naissance de l'humanité. Et comment consommer sans désirer? Deviens soldat du désir. Il n'existe pas de plus beau métier."
Jacques Séguela, La publicité, Les essentiels Milan.
Sophiste de métier! "Noble" inspirateur de nos hommes politiques.
Je vous passe l'explication de texte, et pourtant:
-je t'aime; -j'ai la foi; -c'est ma passion;-c'est un sacerdoce;-avec mon coeur;-aimer, aimer, aimer;-confiance;-désir;-"soldat!?! du désir";-plus beau métier!
Approche behavioriste (répétitions ou matraquage), psycho-dynamique (jouer sur, prendre par les sentiments), intégrative (être ou aspirer à devenir membre du groupe), bel exercice de style qui ne résiste pas une seconde à l'examen critique, si tant est qu'il soit encore possible. Surtout ne pas faire appel à la raison, au risque de manquer sa cible.
Déjà sur You tube!
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